
Talents inexploités : Pourquoi l'accessibilité est la prochaine stratégie de compétitivité du Canada
Le Canada laisse des milliards de dollars de PIB sur la table chaque année en mettant de côté l'une de ses plus grandes sources de talents : les Canadiens handicapés.
Les Canadiens handicapés participent au marché du travail jusqu'à 15 points de pourcentage de moins que leurs pairs non handicapés, même avec des titres de compétence postsecondaires. Cette sous-représentation perde dans un contexte de pénurie de main-d'œuvre qualifiée et de ralentissement de la productivité au Canada.
Nous ne pouvons pas nous permettre de laisser ce talent inexploité, non seulement pour des raisons sociales, mais aussi pour la compétitivité du Canada. Améliorer l'accès au travail n'est pas un acte de bonne volonté : c'est une stratégie de la main-d'œuvre. Et comme toute stratégie qui stimule la productivité, elle mérite la même urgence et le même investissement que l'IA, les technologies propres ou l'infrastructure.
Observations sur le terrain
Les employeurs veulent embaucher de façon inclusive, mais ils sont confrontés à des systèmes qui rendent inutilement difficile l'action. De nombreux employeurs ne résistent pas à l'accessibilité. Ils naviguent simplement sans carte. Les normes d'accessibilité décrivent souvent ce qui doit se passer, mais laissent de côté le comment, en offrant des principes vagues sans outils pratiques. Cela oblige les chefs d'entreprise à devenir des experts de facto en accessibilité tout en gérant leur organisation, ce qui touche de manière disproportionnée les petites et moyennes entreprises qui manquent de capacités internes en RH ou d'équipes juridiques.
En même temps, les soutiens qui existent sont fragmentés. Les établissements postsecondaires offrent une expertise approfondie en matière de handicap, une portée communautaire et des services dédiés aux étudiants. Les entreprises — en particulier les grandes entreprises — peuvent avoir leurs propres lignes directrices et bonnes pratiques. Mais trop souvent, ces ressources vivent en silos, déconnectées les unes des autres et inaccessibles à la majorité des employeurs.
Cette fragmentation fait perdre du temps, des ressources et de l'élan. Il laisse également des milliards de dollars de croissance inexploités. Selon les estimations de TD Economics, la réduction de l'écart en matière d'emploi pour les Canadiens handicapés pourrait créer 450 000 nouveaux emplois d'ici 2030 et ajouter 50 milliards de dollars au PIB. L’Institute for Work & Health a prévu qu’une main-d’œuvre entièrement inclusive pourrait générer des avantages d’une valeur de 253 milliards de dollars à 423 milliards de dollars. — l’équivalent de 13 % à 22 % du PIB du Canada.
Le coût de l'inaction pour les entreprises individuelles est également élevé, non seulement en raison des objectifs d'inclusion manqués, mais aussi de la perte de croissance économique. Selon Accenture, les entreprises leaders en matière d'inclusion des personnes handicapées déclarent 1,6 fois plus de revenus et 2,6 fois plus de revenus nets que leurs pairs. Au-delà des rendements financiers, les employés handicapés apportent des points de vue uniques et des compétences en résolution de problèmes qui stimulent l'innovation, l'adaptabilité et la portée du marché.

Appel aux dirigeants
Si le Canada veut vraiment résoudre sa crise de productivité et combler ses lacunes en matière de compétences, les dirigeants des affaires, de l'enseignement supérieur et du gouvernement doivent considérer l'accessibilité comme un élément central de la stratégie économique. Cela signifie aller au-delà des déclarations d'intention, vers une action coordonnée au niveau des systèmes.
- Traiter l'accessibilité comme une infrastructure, et non comme de l'altruisme. Nous ne mettons pas en doute la valeur d'investir dans l'IA, les technologies propres ou les réseaux de transport pour maintenir la compétitivité du Canada. L'accessibilité exige le même état d'esprit : un investissement à long terme non négociable intégré dans la formation professionnelle, le recrutement, l'intégration et la conception du milieu de travail. Il s'agit de construire l'échafaudage qui appuiera la croissance inclusive pendant des décennies.
- Normaliser le « comment » pour les employeurs. Aucun PDG de la direction ne devrait avoir à repartir de zéro pour comprendre l'accessibilité. Nous avons besoin de normes d'emploi claires et pratiques — aussi simples que des lignes directrices sur la sécurité au travail ou le salaire minimum — associées à des outils prêts à l'emploi et à des ressources disponibles gratuitement. C'est particulièrement important pour les PME, qui constituent la majorité des employeurs canadiens et qui manquent souvent d'expertise spécifique en matière d'accessibilité.
- Utiliser les études postsecondaires comme multiplicateur de force. Les établissements d'enseignement supérieur sont des carrefours naturels pour l'inclusion : ils ont l'expertise en matière de handicap, les liens avec les étudiants et la portée communautaire pour combler le fossé entre les employeurs et les talents inexploités. En centralisant les programmes de AIT accessibles, en créant des réseaux d'employeurs sur le parcours de l'accessibilité et en soutenant la transformation numérique, ils peuvent multiplier l'impact de chaque initiative en matière d'accessibilité.
- Habiliter les talents grâce à de meilleures compétences en signalisant. Nos outils actuels d'articulation et d'évaluation des compétences n'ont pas été conçus en tenant compte de l'inclusion des personnes handicapées. La mise à jour de ces cadres permettra aux diplômés handicapés de présenter clairement leurs compétences, tout en aidant les employeurs à les évaluer sans parti pris pour prendre des décisions d'embauche fondées sur les capacités et non sur des hypothèses.
Des progrès ont été réalisés. Statistique Canada a constaté que l'écart en matière d'emploi entre les Canadiens avec et sans incapacité s'est réduit, passant de 20,8 points de pourcentage en 2017 à 16 points en 2022. Mais les gains étaient fragiles. En 2024, les taux d'emploi globaux ont diminué, les jeunes handicapés ayant connu la baisse la plus forte. Le moment est venu d'obtenir et de tirer parti de ces gains, sinon nous les perdrons.
Les dirigeants qui agissent maintenant débloqueront l'une des plus grandes sources inexploitées de talents au Canada, stimulant la productivité, l'innovation et la croissance à long terme. Ceux qui retardent risquent d'être laissés pour compte dans une économie mondiale qui évolue déjà vers l'inclusion complète de la main-d'œuvre, ratant ainsi l'occasion de transformer le potentiel en avantage concurrentiel.