Mettre en relation les dirigeants. Renforcer les capacités. Favoriser le changement.

L'écart de productivité au Canada : un problème que les établissements postsecondaires et les entreprises doivent résoudre ensemble

L'écart de productivité au Canada : un problème que les établissements postsecondaires et les entreprises doivent résoudre ensemble

La crise de la viabilité financière de l'éducation postsecondaires au Canada est liée à la crise de la productivité et de la croissance des industries canadiennes. En tant qu'entreprises et établissements postsecondaires de premier plan, les membres de TRAES sont tous aux prises avec ces défis à leur façon. Mais le problème n'est pas que l'une ou l'autre des parties puisse résoudre le problème par elles-mêmes. C'est pourquoi nous avons réuni près de 70 dirigeants d'universités, de collèges, d'écoles polytechniques, de plus d'une douzaine d'industries ainsi que de tous les ordres de gouvernement pour partager leurs points de vue en dehors de leurs silos habituels en septembre 2024, au port de TELUS.

Contexte :

Le Canada devrait connaître la croissance économique la plus lente de tous les pays de l'OCDE au cours des 35 prochaines années. Tout le monde n'est pas d'accord pour dire que nous mesurons les bonnes choses, et encore moins avec précision, mais c'est un raccourci pour un lien de questions qui, tout le monde convient, sont des problèmes : la baisse importante des revenus par employé au Canada, la faible production et le revenu généré par heure travaillée, les faibles dépenses de R-D par PIB, l'augmentation du chômage et l'élargissement des écarts de productivité et de salaire avec les États-Unis.

Le Canada affiche également l'un des taux de réussite postsecondaires les plus élevés de l'OCDE. Le fait que ce taux de réussite ne se traduit pas par une croissance économique ou une augmentation de la productivité a entraîné une érosion de la confiance du public dans la promesse de l'éducation supérieure comme voie vers la mobilité sociale ascendante. Pour résoudre ces problèmes, il faut que les établissements postsecondaires, l'industrie et les gouvernements travaillent ensemble. Mais pour y parvenir efficacement, les établissements postsecondaires et l'industrie doivent apporter de grands changements.

Problèmes :

Les établissements postsecondaires ont résisté au changement dans leurs pratiques opérationnelles, structurelles et culturelles. Cette résistance se manifeste dans :

  • Attachement excessif aux modèles d'enseignement traditionnels comme les conférences en personne, les majors disciplinaires et le système de permanence, qui sont de plus en plus en contradiction avec les besoins sociaux, économiques et technologiques d'aujourd'hui.
  • S'en tenir à la « vieille normalité » après la pandémie, malgré les progrès pédagogiques et technologiques réalisés dans l'apprentissage axé sur le numérique. Il y a une aversion pour ce que la nouvelle technologie 1 peut réaliser, par exemple en abandonnant le modèle d'enseignement classique de transmission des connaissances à un modèle qui enseigne les compétences nécessaires pour organiser et utiliser les connaissances avec l'IA, ou en donnant accès à l'éducation à beaucoup plus d'étudiants mal desservis grâce à des modèles universitaires ouverts en ligne. -
  • Lier les résultats de la recherche à la promotion, ce qui donne lieu à des professeurs supérieurs qui sont tous formés en recherche, mais qui peuvent ne pas être formés à l'enseignement ou à l'administration des affaires. Privilégier la recherche par rapport à l'expérience pratique conduit à un cycle de sur-insistance sur la recherche pour les étudiants, en particulier ceux qui sont titulaires d'un diplôme d'études supérieures, alors que ce dont ils ont vraiment besoin est d'apprendre comment fonctionne le travail.
  • Les dirigeants des établissements ont peu de contrôle sur les sources de revenus (financement provincial et frais de scolarité), mais ils ont aussi peu de contrôle sur les coûts importants (salaires du personnel, professeurs titulaires, usine physique). Des rajustements importants ne peuvent être apportés aux prix ni aux coûts en réponse au rendement ou aux changements du marché.

L'industrie au Canada, bien qu'elle soit plus agile que les SPI, est également confrontée à un problème structurel et culturel : le Canada n'a pas de mentalité de « faire les choses ». Notre environnement réglementaire pose trop d'obstacles à l'investissement et à la productivité des entreprises. Par exemple, un producteur agricole de l'Alberta prêt à investir 100 millions de dollars dans la construction du plus grand biodigesteur au Canada attend depuis deux ans l'approbation, alors qu'un projet similaire avec le même producteur n'a pris que 60 jours pour être approuvé au Kansas.

Les formalités administratives ne sont pas le seul défi. Le désalignement entre les compétences et le marché du travail est également étroitement lié aux questions de l'enseignement supérieur et contribue au problème de la productivité :

  • Plus de la moitié des Canadiens hautement qualifiés ayant des qualifications postsecondaires occupent actuellement des emplois peu ou moyennement qualifiés.
  • Et plus du quart des immigrants qui arrivent au Canada finissent par occuper des postes pour lesquels ils sont considérablement surqualifiés.
  • Les secteurs les plus productifs qui contribuent le plus à la croissance ne sont pas les secteurs pour lesquels la plupart des étudiants obtiennent des diplômes postsecondaires.

Solutions possibles :

  1. Tirer parti de ce qui fonctionne : Des solutions novatrices comme l'apprentissage dirigé par les élèves, les compétences pédagogiques plutôt que les connaissances pédagogiques, l'apprentissage expérientiel ou intégré au travail, sont mises en œuvre dans de nombreux établissements, y compris nos membres. Par exemple, l'École de génie Lassonde de l'Université York lance le premier programme d'études entièrement intégré au travail au Canada, où les étudiants passeront 80 % de leurs heures d'apprentissage au travail. Les programmes basés sur la AIT aident également à aborder le coût de l'éducation, car les employeurs et la communauté en général peuvent assumer une plus grande part de la charge d'enseignement. En plus de réduire le coût de l'éducation, AIT contribue à changer comment et ce que les étudiants postsecondaires enseignent, à créer des pipelines de talents plus productifs et à réduire l'inadéquation des compétences. Une autre recommandation commune est que les SPI collaborent davantage avec l'industrie, mais bon nombre d'entre eux le font déjà, et certains le font de manière approfondie. Par exemple, plus de la moitié du budget de R-D de l'Université Laval, membre de la TRAES, provient des investissements de partenaires industriels. Toutefois, les stratégies de collaboration doivent être évolutives à l'échelle d'un plus grand nombre d'établissements et être plus facilement accessibles pour les PME.

     

  2. Les étudiants postsecondaires peuvent agir davantage comme des entreprises : Pour lutter contre la résistance au changement, les institutions devraient tirer parti des connaissances issues de domaines tels que le comportement organisationnel et commencer à se considérer comme une entreprise axée sur le client. L'accent devrait être mis sur les besoins du client, et le client est l'étudiant, et non le corps professoral.

    Avec une clientèle de plus en plus restreinte, les établissements d'enseignement postsecondaire doivent agir comme n'importe quelle entreprise le ferait et élargir leur marché cible : plutôt que des diplômes de quatre ans de créneau qui s'adressent à un sous-groupe de jeunes, ils doivent améliorer l'accessibilité, offrir des options plus souples et des programmes empilables qui encouragent les clients récurrents à apprendre tout au long de la vie. L'Université ouverte pour les aînés de l'Université ouverte de Chine pour les apprenants âgés est un bon exemple d'ouverture du marché à une plus grande base et d'utilisation d'un modèle axé sur le numérique pour répondre à leurs besoins sans coût prohibitif.

    Il existe des possibilités d'élargir les points d'entrée pour le transfert dans des établissements postsecondaires. Et nous pouvons encourager un plus grand nombre d'apprenants qui reviennent avec une meilleure évaluation de leur apprentissage antérieur et la reconnaissance de leur expérience de travail pertinente. Ces améliorations permettront également aux personnes de suivre plus facilement une formation et des titres de compétence supplémentaires, ce qui peut aider à remédier au faible classement du Canada parmi les pays de l'OCDE pour ce qui est de l'obtention d'un diplôme de maîtrise et de doctorat.

    Un meilleur ressourcement et un soutien accrus pour les étudiants autochtones et les étudiants autochtones de niveau postsecondaire sont non seulement la bonne chose à faire, mais ils sont également très judicieux sur le plan des affaires. Il y a trois avantages économiques énormes à combler l'écart en matière d'éducation auquel sont confrontées les communautés autochtones : des gains du PIB, des taux de rétention plus élevés et un bassin de talents déterminés à demeurer au Canada.

    En fin de compte, pour être en mesure d'agir davantage comme des entreprises, les dirigeants d'établissements postsecondaires doivent avoir plus de pouvoir décisionnel pour répondre aux conditions du marché. Les dirigeants de niveau postsecondaire doivent avoir la capacité de rechercher de nouveaux modèles de financement, avoir leur mot à dire sur les prix et être habilités à ajuster, réduire ou réaffecter les coûts au besoin.

     

  3. Et le Canada peut agir davantage comme une PME : si les grandes économies du monde sont comme les grandes entreprises, alors le Canada, en tant que petit pays, doit s'appuyer sur les tactiques que les petites entreprises utilisent pour demeurer concurrentielles.

    Nous devons être moins hiérarchiques et plus collaboratifs. Les entreprises peuvent faire beaucoup de choses lorsqu'elles sont autorisées à collaborer avec les décideurs. Par exemple, l'engagement du gouvernement fédéral à élargir les services de garde nationaux découle en partie de l'écoute de la coalition des entreprises et des syndicats. Nous avons besoin d'un plus grand nombre de collaborations fructueuses de ce genre.

    La productivité ne consiste pas simplement à faire ce que nous faisons déjà plus rapidement et moins cher (bien que cela soit absolument nécessaire). Il crée également de nouvelles idées et de nouveaux produits qui peuvent être concurrentiels sur le marché. Et l'innovation augmente également avec la collaboration : les entreprises qui collaborent avec des établissements postsecondaires investissent en moyenne 80 % de plus dans l'innovation que celles qui ne le font pas.

    Les partenariats de recherche entre l'industrie et les établissements postsecondaires doivent augmenter non seulement par l'entremise des modèles de recherche traditionnels, mais aussi par le biais de la AIT, en faisant de la création de produits et de services concrets une partie de la formation régulière des étudiants de niveau postsecondaires à tous les niveaux.

    Nous devons tirer parti et mieux utiliser nos forces : nos ressources naturelles, une politique favorable à l'immigration, un milieu des affaires engagé et un écosystème AIT en pleine croissance. L'industrie peut aider à orienter le rapprochement des compétences en poussant l'éducation vers des domaines plus productifs, mais nous devons également rendre les domaines moins productifs que tant de diplômés choisissent plus productifs grâce à l'adoption de la technologie et à l'investissement collaboratif.

En fin de compte, aucun secteur n'est en mesure de résoudre ces problèmes à lui seul. Ce n'est pas un hasard si les crises interdépendantes que nous avons identifiées ici nécessitent des solutions interdépendantes et que les entreprises, les établissements postsecondaires et les gouvernements travaillent ensemble. TRAES s'engage à continuer de créer les espaces et les programmes où ce travail collaboratif est réalisé.

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